Sonelgaz durcit le ton face aux entreprises défaillantes

La multiplication des résiliations de contrats

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La multiplication des résiliations de contrats
La multiplication des résiliations de contrats

La vague de résiliations de contrats qui secoue le secteur des infrastructures énergétiques prend une ampleur sans précédent. Un phénomène qui touche aussi bien les grands projets d’infrastructure que les travaux de raccordement et révèle les faiblesses structurelles de nombreuses entreprises du secteur.
La région de Constantine cristallise particulièrement ces difficultés. Le cas du bureau d’études Derouiche Chiheb est symptomatique de cette crise. Chargé de l’étude et du suivi des travaux du nouveau siège de la direction locale, il n’a pas su répondre aux exigences techniques du projet. Les plans fournis présentaient de graves lacunes, notamment concernant les normes de sécurité et les installations techniques. Une situation qui a conduit à la résiliation du contrat après plusieurs tentatives de médiation infructueuses.
À Oum El Bouaghi, la direction de distribution vient de prononcer la résiliation du contrat avec l’entreprise Merzougui Saïda. Cette dernière, attributaire des travaux de raccordement électrique du village Chahid Radjai Ammar Meskiana, accumule les manquements depuis le début du chantier. « Malgré cinq mises en demeure successives, l’entreprise n’a jamais su mobiliser les moyens nécessaires », explique Kamel Hadj, directeur régional de Sonelgaz.
La situation est tout aussi préoccupante à Tiaret où trois entreprises font l’objet de procédures de résiliation. L’EURL Future Clair, chargée des travaux à El Menasria, illustre parfaitement les défaillances constatées : absence de direction technique
qualifiée, matériel insuffisant, non-respect des délais d’exécution.

« Le taux d’avancement n’atteint que 20% alors que le délai contractuel est largement dépassé », souligne un responsable local.
Les conséquences financières pour les entreprises sanctionnées sont lourdes. Outre les pénalités de retard, qui peuvent atteindre 20% du montant du marché, elles doivent faire face à la saisie des cautions bancaires et à l’inscription sur la liste noire des fournisseurs du groupe. Une situation qui met en péril leur survie même, comme en témoigne la récente faillite de deux sociétés de la région d’Oran.

Le phénomène touche également les grands projets d’infrastructure. À Jijel, la société NCC Environnement s’est vu retirer le marché de décontamination de la centrale thermique pour « manquements graves aux obligations contractuelles ». Un chantier sensible qui devra être confié à une entreprise spécialisée étrangère, avec un surcoût estimé à plusieurs millions de dinars.
Les causes de ces défaillances sont multiples selon les experts du secteur.
« Beaucoup d’entreprises ont soumissionné à des prix trop bas, sans avoir les capacités techniques et financières requises », analyse Sofiane Meraghni, consultant en marchés publics. Il pointe également du doigt « l’absence de qualification réelle du personnel technique et l’insuffisance des moyens matériels ».
La direction générale de Sonelgaz a décidé de réagir fermement. Un nouveau système de qualification des entreprises a été mis en place, avec des critères beaucoup plus stricts. Les garanties financières exigées ont été doublées et un contrôle approfondi des références techniques est désormais systématique.
Le suivi des chantiers a également été renforcé. Des équipes d’audit technique effectuent des visites inopinées et un reporting hebdomadaire est exigé de toutes les entreprises. Les pénalités pour retard ont été augmentées et leur application est
devenue systématique.
Ces mesures commencent à porter leurs fruits. Le nombre d’entreprises qualifiées pour les marchés de Sonelgaz a diminué de moitié en six mois, passant de 300 à environ 150. « Nous préférons avoir moins d’entreprises mais des partenaires fiables », affirme un responsable de la direction des marchés.
Pour autant, cette politique de fermeté n’est pas sans risques. La raréfaction des entreprises qualifiées pourrait entraîner une hausse significative des coûts et allonger les délais de réalisation des projets. Un dilemme que Sonelgaz devra gérer avec précaution pour ne pas compromettre son ambitieux programme de développement.
Cette situation met également en lumière la nécessité d’une réforme en profondeur du secteur des travaux publics. Une refonte des procédures de qualification des entreprises et un renforcement de la formation technique semblent indispensables pour éviter que de telles situations ne se reproduisent à l’avenir.

R.E.K