Remporter de pseudos «victoires diplomatiques», quitte à en inventer ! La semaine passée, le ministre d’Etat britannique en charge du Moyen-Orient, de l’Afrique du nord, de l’Asie du Sud et des Nations unies, Lord Tariq Ahmad de Wimbledon, s’est rendu au Maroc à l’occasion de la 4e session du dialogue stratégique et la 2e session du Conseil d’association entre les deux pays.
Désabusé et irrité par le texte de la déclaration conjointe Royaume-Uni-Maroc, où Londres marque clairement son adhésion à une «solution mutuellement acceptable» au sujet du Sahara occidental, le régime du Makhzen, dont cette sortie n’était guère à son goût, a véhiculé une fausse déclaration et des contre-vérités.
«Sur la question du Sahara occidental, le Royaume-Uni a réaffirmé son engagement à aider les parties à parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable à la question du Sahara occidental, fondée sur le compromis, dans le cadre d’arrangements conformes aux principes et objectifs de la Charte des Nations unies», peut-on lire dans le texte original de la déclaration conjointe, publié sur le site web du ministère britanniques des Affaires étrangères.
«Le Royaume-Uni a réitéré sa position de longue date sur le Sahara occidental en faveur des résolutions de l’ONU et de l’importance des principes, y compris l’autodétermination», poursuit le même texte.
Le texte évoque également la réaffirmation du Royaume-Uni et du Maroc de leur «plein soutien aux efforts de l’Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies, M. Staffan de Mistura, pour trouver une solution à ce différend», notant, d’après la même source, que «les deux ministres attendaient avec impatience la prochaine visite de Envoyé personnel du Secrétaire général Staffan de Mistura dans la région dans les meilleurs délais, notamment pour rencontrer toutes les parties prenantes nécessaires, en toute liberté d’accès, afin de remplir son mandat, et ce, conformément aux principes de l’ONU».
«Le Royaume-Uni a souligné le rôle exclusif de l’ONU dans la facilitation du processus politique visant à résoudre ce différend et a réaffirmé son soutien à la résolution 2654 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui a noté le rôle et les responsabilités des parties et appelle à la reprise du réapprovisionnement sûr et régulier des sites des équipes de la Minurso pour assurer la pérennité de la présence de la Mission. Le Royaume-Uni a reconnu les efforts sérieux du Maroc pour faire avancer le processus vers une résolution», a détaillé la déclaration conjointe.
Humilié à son domicile par le contenu de cette déclaration qui nie clairement et sans aucune ambiguïté la souveraineté du Maroc sur le territoire occupé du Sahara occidental, le Makhzen ne retient de ce texte – pourtant signé mutuellement – qu’une phrase, à savoir : «Le Royaume-Uni a reconnu les efforts sérieux du Maroc pour faire avancer le processus vers une résolution», pour tenter de faire miroiter fallacieusement un prétendu «alignement» du palais de Westminster sur la proposition du roi marocain sur l’autodétermination et la marocanité de ce territoire.
Une manipulation qu’entreprend le Makhzen pour sauver sa peau devant l’opinion publique interne, mais qui n’entamera manifestement que sa crédibilité et la confiance de la communauté internationale.
Et face à l’attachement – de longue date – de Londres à la légalité internationale et onusienne dans la résolution de ce conflit, la solution pour sortir de cette tourmente est vite trouvée par les autorités marocaines : recourir en permanence au mensonge et à la déformation de la vérité.
Ainsi, il ne faut pas être très surpris par la sortie du ministre marocain des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, lors d’une conférence de presse, encensant «la position positive du Royaume-Uni sur la question du Sahara marocain».
«Nous saluons la position positive du Royaume-Uni concernant le Sahara marocain et son rôle constructif au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, en tant que membre du groupe des amis du Secrétaire général sur le Sahara marocain et membre permanent du Conseil, et qui suit avec intérêt la sécurité et la stabilité dans l’Afrique du Nord», a déclaré Bourita, selon les propos rapportés par le journal «Maroc Diplomatique».
Le procédé n’est pas nouveau chez les services du Makhzen et leur propagande s’est longtemps reposée sur le mensonge.
Le trucage des communiqués et déclarations des responsables européens semble être la marque de fabrique du Makhzen.
Ainsi, en mars dernier, le quotidien espagnol «El Confidencial» a fait éclater un scandale en révélant que la lettre adressée par le chef du gouvernement espagnol Pedro Sánchez à Mohammed VI soi-disant que la proposition marocaine de l’autodétermination est la «base la plus sérieuse, crédible et réaliste pour résoudre ce conflit», a été rédigée par les services de Rabat, qui était le premier à la rendre publique.
D’après le même journal, il s’agit d’une décision dont n’auraient pas été consultés, encore moins informés, les membres de son cabinet – y compris le ministre des Affaires étrangères José Albarès – et les députés des deux Chambres du Parlement.
Le même journal a constaté des contradictions et irrégularités entre la lettre envoyée par le gouvernement espagnol au quotidien «El Paìs» et celle publiée par le ministère des Affaires étrangères marocain.
En confrontant la lettre publiée par «El Paìs» et le communiqué du ministère des Affaires étrangères marocain, qui diffèrent considérablement en ce sens que le deuxième texte est plus clair et explicite, l’enquête d’«El Confidencial» suggère même qu’elle a été rédigée tout d’abord en français à Rabat avant d’être expédiée à Sánchez pour la traduire à la hâte dans sa langue et la signer ensuite.
Hamid Mecheri