Par Yacine Merzougui
La décision du président de la République d’attribuer la médaille de l’Ordre du mérite national au rang « Athir » au moudjahid Salah Goudjil transcende la simple reconnaissance d’un parcours individuel. Elle démontre la continuité institutionnelle de l’État algérien et sa
capacité à honorer ceux qui ont consacré leur existence au service de la Nation, des maquis de la révolution aux plus hautes charges de la République.
Le geste présidentiel revêt une dimension symbolique particulière en ce qu’il salue un homme qui incarne parfaitement la synthèse entre l’engagement révolutionnaire et l’exercice démocratique du pouvoir. Salah Goudjil, qui achève son mandat à la tête du Conseil de la nation, aura marqué cette institution de son empreinte, alliant l’expérience du combattant à la sagesse du législateur. Cette distinction intervient à un moment charnière où l’Algérie s’interroge sur la transmission de ses valeurs fondatrices aux nouvelles générations. En honorant un moudjahid qui a su adapter son combat aux exigences de la construction nationale, le président Tebboune
rappelle que l’héritage révolutionnaire ne se fossilise pas dans la nostalgie mais se prolonge dans l’action quotidienne au service de l’intérêt général.
Le parcours de Salah Goudjil au sein du Conseil de la Nation témoigne de cette alchimie particulière entre mémoire et modernité. Président de cette chambre haute du Parlement, il aura su imprimer à ses travaux la rigueur et l’intégrité qui caractérisent les hommes forgés dans l’épreuve de la guerre de libération. Sa gestion de cette institution constitutionnelle aura été marquée par un souci constant de préservation de la dignité parlementaire et de respect des procédures démocratiques. L’attribution de cette médaille « Athir » – qui signifie « illustre » en arabe – prend également une résonance particulière dans le contexte politique actuel. Elle souligne l’importance accordée par les institutions de la République à la reconnaissance du mérite et à la valorisation de l’engagement désintéressé. Dans une période où les sociétés contemporaines peinent parfois à identifier leurs modèles, l’exemple de Salah Goudjil rappelle que l’excellence dans le service public reste possible et reconnaissable. Cette distinction est inscrite dans la politique mémorielle de l’État algérien qui s’attache à préserver le lien entre les générations de l’indépendance et celles de l’Algérie contemporaine. En honorant un moudjahid qui aura servi la République dans ses plus hautes instances, le président Tebboune actualise le message révolutionnaire et lui donne une traduction institutionnelle concrète.
Le moment choisi pour cette décoration révèle aussi une certaine philosophie du pouvoir. Plutôt que d’attendre une reconnaissance posthume, l’État algérien choisit d’honorer de son vivant un homme qui aura consacré son existence au service de la patrie. Cette approche témoigne d’une maturité institutionnelle qui sait reconnaître et célébrer le mérite au moment opportun. L’exemple de Salah Goudjil interroge également sur les critères de l’excellence publique dans l’Algérie d’aujourd’hui. Son parcours démontre que la légitimité révolutionnaire, loin d’être un privilège figé, doit sans cesse se renouveler dans l’exercice quotidien des responsabilités. Cette leçon de cohérence et de persévérance mérite d’être méditée par tous ceux qui aspirent à servir la chose publique.
En décernant cette distinction, le président de la République honore non seulement un homme mais aussi une certaine idée de l’engagement citoyen. Il rappelle que la grandeur d’une nation se mesure aussi à sa capacité de reconnaissance envers ceux qui l’ont servie avec abnégation et compétence.
Y.M