Il est des articles de la loi fondamentale qui encadrent toute proposition et tout amendement d’une quelconque proposition de loi si le contenu est jugé contradictoire avec l’esprit de la Constitution. L’article 147 de la Constitution souligne sans ambages qu’« il est irrecevable toute proposition de loi ou amendement présenté par les membres du Parlement ayant pour objet ou pour effet de diminuer les ressources publiques ou d’augmenter les dépenses publiques, sauf si elle est accompagnée de mesures visant à augmenter les recettes de l’État ou à faire des économies, au moins correspondantes, sur d’autres postes des dépenses publiques. » C’est le cas de quatre amendements apportés par les députés de la chambre basse du Parlement que le Sénat a refusé de valider, sollicitant l’arbitrage de la Cour constitutionnelle. Le premier concerne, en effet, un amendement apporté sur le chapitre des impôts directs et taxes assimilées. En vertu de l’article 23 du PLF, qui fait référence aux dispositions de l’article 282 du Code des impôts directs et taxes assimilées, il est précisé que « les contribuables soumis à l’impôt forfaitaire unique (…) la marge bénéficiaire est réglementée. » Les mêmes dispositions soulignent que « les contribuables soumis à l’IFU (impôt forfaitaire unique) doivent mentionner sur la déclaration définitive le revenu net réalisé correspondant au chiffre d’affaires déclaré au titre de l’exercice clos». Sur ce point, un impôt est arrêté sur le chiffre d’affaires réalisé lorsqu’il excède le seuil de 8 millions de dinars. Dans l’exposé des motifs, il est dit que « la présente proposition de mesure a pour objet de prévoir l’obligation faite aux contribuables relevant du régime de l’impôt forfaitaire unique de mentionner sur leur déclaration définitive le revenu net réalisé correspondant au chiffre d’affaires déclaré de l’exercice clos, afin de connaître les revenus des catégories des contribuables ». Concernant l’article 29 du PLF, qui fait référence à l’article 365 bis du Code des impôts, il est précisé que « le montant dû au titre de l’impôt forfaitaire unique ne peut être inférieur, pour chaque exercice et quel que soit le chiffre d’affaires imposable, à 30.000 DA. Toutefois, pour les activités exercées sous le statut d’auto-entrepreneur, ce montant est fixé à 10.000 DA. Le minimum d’imposition doit être acquitté intégralement au plus tard le 30 juin de l’année concernée». Il est ainsi précisé qu’en l’état actuel de la législation fiscale, «le minimum d’imposition devant être acquitté au titre de l’impôt forfaitaire unique est fixé à 10.000 DA annuellement, ce qui représente une charge fiscale mensuelle de 800 DA. Ce montant d’imposition est acquitté par les contribuables dont le chiffre d’affaires annuel n’atteint pas 200.000 DA pour ceux soumis au taux de 5 %, et 83.000 DA pour ceux dont l’activité relève du taux de 12 % ». À ce titre, il est à souligner qu’un salarié percevant un revenu mensuel de 45.000 DA acquitte un montant d’IRG de 4.450 DA (soit 53.400 DA par an), d’où la proposition de relever à 30.000 DA le minimum d’imposition en matière d’impôt forfaitaire unique. Pour les activités exercées sous le statut d’auto-entrepreneur, le minimum d’imposition demeure inchangé, à savoir 10.000 DA.
Enregistrement d’actes notariés
Concernant l’enregistrement, qui est apparu également comme un point d’achoppement dans les amendements apportés à la proposition de l’Exécutif, la Cour constitutionnelle devra trancher. L’article 33 du PLF, faisant référence aux dispositions de l’article 123 du Code de l’enregistrement, souligne dans le chapitre consacré aux « Actes en conséquence et actes produits en justice » que « les notaires, greffiers, agents d’exécution des greffes et autres fonctionnaires publics ainsi que les autorités administratives ne peuvent faire ou rédiger un acte en vertu ou en conséquence d’un acte soumis obligatoirement à la formalité de l’enregistrement sur minute ou l’original annexé à leurs minutes, le recevoir en dépôt, ni le délivrer en brevet, extrait, copie ou expédition, avant qu’il ait été dûment timbré ou enregistré, alors même que le délai pour le timbrage ou l’enregistrement ne serait pas encore expiré, à peine d’une amende de 500 DA à l’encontre des notaires exerçant pour leur propre compte, de répondre personnellement des droits. » Sont exceptés les exploits et autres actes de cette nature qui se signifient à parties ou par affiches et proclamations. Le PLF 2025 explique que les greffiers ne sont pas concernés, jusqu’à présent, par ces dispositions, d’où la volonté de les intégrer. La proposition a pour objet de modifier les dispositions de l’article 123 du Code de l’enregistrement. En l’état actuel de la législation, les dispositions de cet article ne prévoient pas la fonction d’huissier parmi ceux qui établissent des actes en vertu ou en conséquence. Aussi, il y a lieu de les prévoir parmi les officiers publics concernés par cet article, en substitution aux agents d’exécution des greffes. Par ailleurs, il est question de mettre en cohérence cet article avec les articles 9 et 15 du même Code, permettant désormais la présentation des expéditions pour la formalité de l’enregistrement. En outre, il a été procédé à la suppression de la référence au délai de timbrage des actes, dans la mesure où celui-ci n’est pas concerné par un délai, contrairement à l’enregistrement. De plus, et conséquemment au changement de statut des notaires, l’expression «exerçant pour propre compte» est supprimée puisqu’elle n’a plus raison d’être. Enfin, cette modification vise l’aggravation de la sanction de 500 DA à 100.000 DA en cas d’établissement, par les notaires, d’un acte en vertu ou en conséquence d’un acte dont la mention de l’enregistrement n’est pas précisée, conformément aux dispositions de l’article 125 du Code, et ce, même si le délai fixé pour l’enregistrement n’est pas expiré.
La vignette automobile plus chère
Enfin, la proposition faite dans le PLF 2025 «a pour objet de relever le tarif de la vignette automobile applicable aux véhicules de tourisme et véhicules aménagés en utilitaires d’une puissance de 10 CV, afin de subvenir à l’entretien des infrastructures routières». Il est souligné qu’« en effet, l’actualisation progressive des tarifs de la vignette automobile, qui n’ont pas fait l’objet de révision depuis l’institution de la vignette en 1997, s’impose comme une nécessité pour compenser l’augmentation des coûts liés à la gestion du trafic et à la sécurité routière, ainsi que pour le financement des projets de transport public de voyageurs et de marchandises». Ce sont donc les amendements jugés en contradiction avec la loi fondamentale pour lesquels le Sénat a demandé l’arbitrage de la Cour constitutionnelle.
L. Hichem