Martyrs : honneur et devoir de mémoire

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Edito
Par : Mohamed Mouloudj

Ils sont tombés, le front haut, le regard tourné vers un avenir qu’ils savaient meilleur. Un avenir pour lequel ils ont consenti le sacrifice suprême. Ils ont offert leur jeunesse, leurs rêves et jusqu’à leur dernier souffle pour une cause plus grande qu’eux. Les martyrs de la guerre de Libération ne sont pas de simples noms gravés sur des stèles, ni de furtifs souvenirs à raconter. Ils sont la sève qui, non seulement irrigue l’Algérie, mais le monde libre. Ils sont ce sang versé qui a nourri la terre de la dignité retrouvée. Durant plus de sept années de lutte acharnée, de 1954 à 1962, des hommes et des femmes, armés de courage, d’amour de la patrie et de la conviction inébranlable d’une justice à reconquérir et d’une liberté à recouvrer ont bravé l’une des armées coloniales les plus puissantes du monde. Dans les maquis, les prisons, le terrain de la lutte politique, dans les villages bombardés, les villes quadrillées, ils ont porté le
flambeau de la liberté sans jamais fléchir. L’objectif était clair. Il fallait mettre fin à un siècle et demi de domination coloniale, rétablir la souveraineté nationale et rendre à l’Algérie sa place parmi les nations libres. Le sacrifice des chouhada n’a pas été vain. Il a enfanté une nation débarrassée du joug colonial, une patrie qui a su renaître des cendres du génocide, humain, culturel et politique imposé par le colonialisme français. Leur sacrifice a également ouvert les yeux aux peuples sous domination pour qu’ils prennent leur destin en main et défendre à leur tour leur dignité et liberté. Mais l’hommage ne peut se résumer à des commémorations annuelles ou à des discours de circonstance. Il impose un devoir moral et politique. C’est celui de ne jamais trahir leur combat. C’est en garantissant une Algérie forte, juste et fidèle à leurs idéaux que nous honorons leur mémoire. Or, si la page du colonialisme a été tournée, elle ne saurait être arrachée du livre de l’Histoire. La vérité ne peut se diluer dans l’oubli, et la reconnaissance des crimes coloniaux n’est pas une simple question de mémoire, mais un impératif de justice, une exigence historique et un besoin éthique. La criminalisation du colonialisme sert aussi, comme toute vérité, à adoucir les douleurs, mais sans jamais les oublier. Ce n’est ni un acte de revanche, ni un refus de tourner la page, mais une étape essentielle pour une relation apaisée entre le colonisé et le colonisateur. C’est le respect ultime envers ceux qui sont tombés pour que plus jamais l’oppression ne dicte sa loi. Plus jamais une nation domine une autre ou un peuple asservi un autre. Les martyrs de la guerre de Libération ne demandent rien. Mais nous, en tant que citoyens, avons le devoir de ne jamais cesser de revendiquer la vérité et la justice en leur nom. Car leur sacrifice est notre serment d’honneur. Et quand il s’agit de l’honneur, aucun peuple ne baissera les bras.