«L’Algérie dépassera les 30 millions de tonnes des déchets d’ici 2025»

Salima Sayah Haki, experte en économie

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La gestion intégrée des déchets s’inscrit depuis des années dans la mise en œuvre de la politique environnementale pour éradiquer les pratiques des décharges sauvages grâce à la multiplication des Centres d’enfouissement technique (CET) afin de garantir la protection de l’environnement. Cette opération est-elle suffisante pour faire disparaître des tonnes de déchets et préserver l’hygiène en milieu urbain ? MmeSayahHaki Salima, experte analyste en économie environnementale, nous a accordé cet entretien pour donner plus de précisions sur la politique nationale de l’environnement adoptée par les pouvoirs publics.

Entretien réalisé par Naima Allouche

«e-Bourse» : Est-ce que la gestion intégrée des déchets peut contribuer au développement économique, outre l’amélioration de notre cadre de vie ?

SalimaSayahHaki : Dans la littérature économique, l’une des préoccupations de la politique économique consiste à garantir le développement durable, c’est un pilier majeur dans chaque plan de développement. Le développement durable à son tour donne beaucoup d’importance à la préservation de l’environnement afin de protéger les ressources et le potentiel d’aujourd’hui pour les générations futures. Le développement économique en Algérie a été, pour longtemps, financé essentiellement par les rentes énergétiques. Ce secteur générant du cash flow pour le pays et qui est derrière l’épanouissement financier, peut parallèlement être parmi les causes de la dégradation de l’environnement. Face à l’expansion du secteur de l’énergie, celui de l’automobile, l’accélération de l’activité industrielle et la mise à la disposition de la population et de l’industrie de produits énergétiques s’est manifesté le besoin urgent de protéger l’environnement et empêcher sa dégradation. En effet, le secteur de l’énergie accorde une grande importance aux questions liées à la préservation de l’environnement et de la santé publique. L’intégration de ces préoccupations dans la politique sectorielle puise ses fondements dans le volet «politique de l’énergie» du programme du gouvernement. Une importance interprétée par la mise en œuvre des mesures de dépollution et la réhabilitation des sites pollués et le développement du management environnemental au niveau du secteur de l’énergie.

Comment peut-on procéder à la gestion des déchets pour renforcer les efforts de la dépollution ?

La gestion des déchets en Algérie est une action prioritaire du ministère chargé de l’environnement. Des moyens humains et techniques ont été engagés depuis des années pour améliorer ce service. En même temps, la production de déchets ne cesse d’augmenter suite à l’augmentation de la population et à la croissance économique. Les quantités générées par toutes les activités et la population pourraient dépasser les 30 millions de tonnes en 2025 si aucune politique de prévention n’est mise en œuvre et les mêmes tendances macroéconomiques et socio-économiques se prolongent dans les années qui viennent. Sur le plan économique, l’adoption de l’enfouissement technique des déchets a engendré des coûts supplémentaires aux Collectivités. Le financement de ce service par une taxe forfaitaire reste inapplicable. L’amélioration de la qualité de service rendu pourra inciter les ménages à participer financièrement pour couvrir les coûts de la collecte et de traitement de leurs déchets. Une réorganisation des circuits de collecte influera sur la baisse des coûts, notamment celle liée à la distance de collecte.

D’après vous, pourquoi l’Algérie n’arrive pas à produire de l’énergie à partir de ces énormes quantités de déchets ?

La production du biogaz est une source d’énergie renouvelable, qui consiste à récupérer et à valoriser l’énergie produite lors du traitement des déchets sous forme de chaleur, d’électricité et de carburant. On peut distinguer deux sortes de valorisation énergétique : la valorisation par traitement thermique (incinération, co-incinération, pyrolyse et gazéification) et la valorisation du biogaz issu notamment des installations de stockage de déchets non dangereux et de la méthanisation des déchets organiques. La valorisation énergétique permet, dans le respect de la hiérarchie des modes de gestion des déchets, d’utiliser les déchets qui n’ont pu être ni recyclés ni valorisés sous forme de matière, comme source d’énergie renouvelable. La valorisation énergétique participe également à la réduction des gaz à effet de serre et limite le recours aux énergies fossiles. Pour en tirer profit, l’Algérie doit se doter des techniques et techniciens ainsi que des équipements nécessaires à cette démarche et ses opérations telles que l’incinération avec récupération d’énergie, les combustibles solides de récupération (CSR), la pyrolyse, la gazéification et la valorisation énergétique du biogaz.

Entretien réalisé par Naima Allouche