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lundi, mai 29, 2023

L’acte barbare

Par Salah Bey

«Toute tyrannie qui entre en agonie tente d’entraîner dans sa propre mort le plus grand nombre d’hommes possibles», écrivait Jean Ziegler. Le crime contre la bibliothèque algérienne dépasse toute la barbarie du monde contre un peuple réveillé pour chasser la bête immonde de ses terres spoliées et ses richesses volées. Cet acte criminel peut aussi être défini comme un autodafé.

Ces attentats étaient attribués à un groupuscule de partisans de «l’Algérie française» qui réagissaient à l’annonce du cessez-le-feu, le 19 mars 1962. L’histoire retient que ce 7 juin 1962,  la France coloniale a laissé une profonde douleur impensable ! Le bâtiment abritant la bibliothèque de la faculté d’Alger a pris feu, détruisant un fonds documentaire d’un demi-million d’ouvrages.

Un temple de la science que rien ne compense parti en fumée.  Ce temple qui laissa le plus de traces dans la civilisation occidentale s’est volatilisé. La BU était l’une des bibliothèques les plus anciennes et les plus riches d’Afrique, comptant près de 600.000 ouvrages scientifiques et manuscrits inédits en arabe et en latin. 80.000 ouvrages seulement ont été sauvés. L’acte criminel visait à priver l’Algérie indépendante de ce potentiel scientifique et culturel. Pour reconstituer ce que «le vandalisme» avait détruit, un Comité international pour la reconstitution de la bibliothèque universitaire d’Alger a été créé en décembre 1962.

Les crimes culturels commis de 1830 à 1962, dans le sillage d’une guerre d’extermination féroce, obéissaient à la même logique qui consistait à plonger l’Algérien dans la déchéance intellectuelle, comme ce fut le cas avec la politique d’analphabétisation contre le peuple pour le manipuler.

L’acte immonde s’inscrivait dans la sombre lignée des incendies des bibliothèques connus dans l’histoire de l’Humanité. Il rappelle tristement les commandos fascistes qui ont anéanti la bibliothèque de Louvain en 1914, Celle de Beyrouth par Sharon ou la bibliothèque d’Alexandrie en l’an 640 de notre ère. Aucune époque, aucun peuple n’est à l’abri du désastre moral que constitue la destruction de livres comme de tout ce qui permet à l’homme de réfléchir sur sa condition. Le diktat colonial a accompli un énième assassinat maléfique de la science et la culture.

La journée du 7 juin, consacrée «Journée nationale du livre et de la bibliothèque» vient raviver l’immensité du drame et rappeler la barbarie de ces colons venant du nord pour semer prétendument la civilisation… A ne pas oublier.

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