Niamey annonce traduire Bazoum en justice pour haute trahison
Une nouvelle date a été confirmée pour la réunion extraordinaire des chefs des états-majors des armées des pays de la Cedeao, qui se tiendra les 17 et 18 août à Accra, au Ghana. La Commission de l’institution régionale a adressé une invitation aux ministres de la Défense, leur demandant d’autoriser leurs chefs d’état-major à y participer. Ils ont reçu mandat des chefs d’Etat d’activer et de déployer la force d’attente, sans délai, pour intervenir au Niger.
Par ailleurs, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine (UA) s’est réuni lundi pour discuter de «l’évolution de la situation au Niger et des efforts pour y remédier». Cette réunion de l’organe en charge des conflits et questions de sécurité au sein de l’Union africaine s’est tenue alors que les auteurs du coup d’Etat au Niger ont donné ce week-end des signaux divers, se disant d’abord ouverts à la négociation, avant d’annoncer une lourde sentence à l’encontre du Président renversé.
Poursuivre Mohamed Bazoum pour «haute trahison»
Dans un communiqué paru dimanche 13 août en fin de soirée, les auteurs du coup d’Etat au Niger ont annoncé avoir des «preuves pour poursuivre devant les instances nationales et internationales compétentes le Président déchu et ses complices locaux et étrangers, pour haute trahison et atteinte à la sûreté intérieure et extérieure du Niger».
Détenu depuis le 26 juillet après un coup de force mené par des militaires, le président nigérien Mohamed Bazoum fait face à de nouvelles accusations des putschistes. Ces derniers, en voie de s’institutionnaliser en nommant d’abord Ali Lamine Zeine Premier ministre, ont formé un gouvernement civil et opéré un mouvement dans le corps diplomatique pendant cette période trouble au Niger.
Dans la foulée de ces décisions, somme toute prévisibles, les putschistes ont pris la parole dans la soirée du 13 août, annonçant leur intention de «poursuivre» le chef d’Etat déchu pour «haute trahison» et «atteinte à la sûreté» du pays.
«Le gouvernement nigérien a réuni à ce jour, (lundi, ndlr)» les «preuves pour poursuivre devant les instances nationales et internationales compétentes le Président déchu et ses complices locaux et étrangers, pour haute trahison et atteinte à la sûreté intérieure et extérieure du Niger», a déclaré le colonel-major Amadou Abdramane, un des membres du Conseil national de sauvegarde de la patrie (CNSP), dans un communiqué lu à la télévision publique.
Mohamed Bazoum, sa famille et plusieurs de ses proches sont toujours retenus dans le sous-sol de la résidence présidentielle à Niamey. Samedi 12 août, le Président nigérien a pu recevoir la visite de son médecin personnel. Selon ce dernier, toutes les personnes retenues «vont bien» et Mohamed Bazoum «a le moral haut». Mais le Président a indiqué que le traitement réservé aux siens et à lui-même est «inhumain et cruel».
Le Niger durement éprouvé par les sanctions de la Cedeao
Dimanche, le général Abderrahmane Tchiani a également dénoncé les sanctions «illégales, inhumaines et humiliantes» de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), qui s’oppose au coup d’Etat et menace d’un recours à une intervention armée pour rétablir l’ordre constitutionnel, bien que la voie de la diplomatie soit toujours privilégiée.
Les sanctions de la Cedeao vont jusqu’à priver le pays de produits pharmaceutiques, de denrées alimentaires» et «de fourniture en courant électrique», a affirmé le colonel-major Amadou Abdramane.
Cette décision du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) a un peu surpris au moment où les putschistes se sont déclarés ouverts au dialogue pour trouver une issue à la crise. Les observateurs sont partagés : certains estiment que la junte souffle le chaud et le froid, tandis que d’autres voient plutôt un durcissement de ton, surtout avec cette pique décochée à l’encontre de la Cedeao.
L’élan de solidarité avec le Niger s’élargit
Le Togo rejoint le Mali et le Burkina Faso dans la crise du Niger. En effet, le président togolais, Faure Gnassingbé, interdit l’utilisation de l’espace aérien togolais pour la force d’attente de la Cedeao qui a désormais le feu vert d’Abuja, à la tête de la présidence tournante de ce bloc composé de 15 membres.
Le président togolais Faure Gnassingbé aurait interdit l’utilisation de l’espace aérien de son pays pour la coordination de la force d’attente de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), indiquent des sources diplomatiques, selon Confidentiel Afrique le samedi 12 août 2023.
Cette information survient après que le Tchad a également refusé d’autoriser l’utilisation de son espace aérien dans le contexte de la force d’attente de la Cedeao. De même, Tinubu Bola, le président du Nigeria, fait face à des obstacles internes, notamment des oppositions de son propre parti politique et d’une grande partie des sénateurs nigérians, qui rejettent l’intervention militaire de la Cedeao.
Le Cap-Vert, membre de la Cedeao, s’oppose aussi à une intervention militaire de l’organisation. «Nous devons tous œuvrer pour l’ordre constitutionnel au Niger, mais sans intervention militaire», a déclaré le président, José Maria Neves.
Ces informations mettent à mal les défis auxquels sont confrontées les tentatives de coordination et d’activation du déploiement militaire dans le cadre de la Cedeao qui joue avec le feu, dans une situation régionale sensible.
Les cellules dormantes actionnées
Six soldats, dont le chef de la mission, et dix terroristes ont été tués et un autre a été blessé, d’après le «bilan provisoire» du Haut commandement de la Garde nationale.
Les soldats nigériens qui étaient à bord de cinq véhicules «ont engagé une poursuite» contre des djihadistes présumés, lorsqu’ils sont tombés dans une embuscade aux environs de 11h, heure locale, à une vingtaine de kilomètres de la ville de Sanam, dans l’ouest du pays, explique un communiqué.
Selon la même source, l’embuscade a été tendue «par des terroristes» qui conduisaient «une dizaine de motos».
«Dix terroristes» ont été tués lors d’une «opération de ratissage» menée par des «renforts aériens et terrestres», affirme le communiqué, et quatre motos des assaillants ont été «détruites».
Neuf autres victimes ont été abattues samedi dans la localité de Sanam, dans la région de Tillabéri, dans la zone dite des «trois frontières» située entre le Niger, le Mali et le Burkina Faso, théâtre de nombreuses attaques djihadistes.
S.B.