Les participants à la réunion de haut niveau organisée sous le thème « La justice pour les Africains et les personnes d’ascendance africaine par les réparations », qui s’est tenue vendredi à Addis-Abeba, ont souligné l’importance de créer un front commun et uni afin de demander justice et réparation pour les crimes historiques commis contre les peuples africains. Parmi ces atrocités figurent notamment le colonialisme, la discrimination raciale et les génocides.
Cette rencontre, organisée au siège de l’Union africaine (UA), a appelé à une action collective visant à réparer les injustices passées et à remédier aux séquelles du colonialisme, de l’esclavage et de la discrimination raciale. Les discussions ont mis en lumière la nécessité de mobiliser des ressources financières pour compenser les pays africains victimes de l’exploitation coloniale, tout en investissant dans des domaines clés tels que les infrastructures, l’éducation et la santé afin de soutenir le développement économique du continent.
L’Afrique et sa diaspora : vers un rapprochement Les intervenants ont également insisté sur l’importance majeure de la question des réparations pour les Africains, soulignant que cette démarche pourrait contribuer à renforcer les liens entre le continent africain et sa diaspora. Ils ont rappelé que la traite transatlantique des esclaves et les politiques coloniales ont durablement affecté l’Afrique, entraînant des conséquences sociales, économiques et culturelles encore perceptibles aujourd’hui.
Le ministre ghanéen des Affaires étrangères, Samuel Okudzeto Abalakwa , a affirmé
l’engagement de son pays à travailler avec les autres nations africaines pour « criminaliser le colonialisme et l’esclavage » . Il a plaidé en faveur de la mise en place d’une stratégie commune exigeant des anciennes puissances coloniales des compensations financières et matérielles destinées à favoriser le développement du continent.
Témoignage émouvant : l’héritage de Mokhtar Kerkeb Dans une allocution marquante lors de cette réunion, Djazia Kerkeb , fille du défunt moudjahid algérien Mokhtar Kerkeb, a rappelé que toute discussion sur les réparations pour les Africains devait inclure un retour sur les mouvements de libération africains et leurs luttes emblématiques.
Elle a exhorté les participants à revisiter le parcours militant de son père, qui avait consacré une grande partie de sa vie à soutenir les causes de libération sur le continent.
Elle a décrit comment son père, après avoir rejoint très jeune les rangs de l’Armée de Libération Nationale (ALN) pendant la Guerre de libération de l’Algérie, avait poursuivi sa formation militaire à l’Académie militaire de Moscou. De là, il avait noué des relations étroites avec des représentants de mouvements de libération africains basés à Alger, avant de se rendre dans plusieurs pays pour partager l’expérience algérienne en matière de lutte contre la colonisation.
Parmi les personnalités qu’il avait côtoyées durant cette période, Djazia Kerkeb a cité des figures emblématiques comme Samora Machel (Mozambique), Sam Nujoma (Namibie), Agostinho Neto (Angola) et Joaquim Chissano (Mozambique). Selon elle, son père considérait que l’indépendance de l’Algérie ne serait complète que lorsque tous les États africains auraient également recouvré leur liberté.
Mokhtar Kerkeb, dont le nom reste associé à une solidarité inconditionnelle avec les luttes de libération en Afrique, voyait dans cet engagement une mission essentielle pour l’Algérie. « Si Mokhtar », comme elle l’a appelé, croyait fermement que « contribuer au soutien des mouvements de libération était un engagement national » , reflétant ainsi une vision pan-africaine
profondément enracinée.
Vers une reconnaissance internationale des effets du colonialisme Les participants à la réunion ont également appelé la Commission de l’UA à intensifier ses efforts pour reconnaître et documenter les impacts du colonialisme et de l’esclavage sur les sociétés africaines. Cette démarche vise à établir un cadre juridique solide permettant deréclamer des comptes aux anciennes puissances coloniales.
Cette réunion à Addis-Abeba illustre une nouvelle volonté politique au sein du continent africain de faire face ensemble à un passé douloureux et d’exiger des réparations justes. L’appel à un front uni montre la détermination des Africains à obtenir non seulement des indemnisations financières, mais aussi un soutien concret pour construire un futur plus équitable et prospère.
D.K