Une grande partie des petits exploitants et d’éleveurs, estimée à près de 80% des agriculteurs n’ont pas les conditions et garanties d’accès au financement bancaires, notamment celles liées à l’assurance agricole, a indiqué lundi à Alger le ministre de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche, Abdelkader Bouazghi.
Intervenant lors d’un séminaire international consacré à l’assurance agricole, organisé par la Caisse nationale de mutualité agricole (CNMA), M. Bouazghi a estimé que « le niveau d’activité de ces agriculteurs restait proportionnel à leur capacité d’autofinancement ce qui les excluent de la dynamique de modernisation du secteur », ajoutant qu’à titre d’exemple, 17.000 céréaliculteurs seulement accèdent au crédit de campagne sur les 600.000 céréaliculteurs activant en Algérie.
Dans ce sens, le ministre a expliqué « la dynamique forte qu’exige aujourd’hui la modernisation du secteur devra être appuyée par l’association de l’assurance agricole, outil indispensable d’accompagnement du programme de développement du secteur ».
Toutefois, le marché des assurances agricoles en Algérie est « très peu développé » même si ce segment a enregistré durant les trois dernières années une « évolution sensible ».
L’évolution des cotisations émises des assurances a connu une nette progression passant de 5,750 milliards de dinars (mds da) en 2010 à 12,711 mds da en 2016, soit une progression de l’ordre de 122% tandis que le montant de sinistres déclarés a passé de 3 mds da en 2010 à près de 7 mds da en 2016, soit une hausse de 130% pour celui des sinistres payés aux sociétaires et usagers assurés.
« Pourtant ces données chiffrées du portefeuille liées aux assurances agricoles et piscicoles sont loin de couvrir les risques encourus par les biens et les personnes des agriculteurs, des éleveurs et des pêcheurs eus égard aux potentialités existantes », note le ministre.
Il a appelé, dans ce cadre, à moderniser les assurances agricoles par l’introduction de nouveaux produits adaptés aux conditions climatiques du pays notamment la sécheresse récurrente et aux nouvelles réalités socio-économiques des agriculteurs.
La police d’assurance devra être conçue pour englober une large gamme de dommages car les pertes engendrées seront considérées comme un manque à gagner par rapport aux résultats que l’agriculteur aurait pu réaliser dans les conditions normales, a insisté le ministre plaidant « une adaptation plus poussée aux besoins spécifiques et particuliers des agriculteurs ».
Il a souligné, par ailleurs, que la CNMA est confrontée aujourd’hui aux transformations que connait son environnement à la suite de l’ouverture du marché des assurances à la concurrence d’une part, ainsi que le ralentissement de la conjoncture économique globale du pays, d’une autre part.
Mais en dépit de ces mutations, la CNMA se situe à la troisième place pour les assurances dommages globales et reste le leader des assurances agricoles avec 43% du total du marché.
En outre, la progression du portefeuille global de la CNMA au 30 juin 2017 a été de +2% sur un an, alors que le marché global des assurances a été en régression de -8,6%.
Le ministre a recommandé un « effort de communication » en direction des agriculteurs, éleveurs et pêcheurs afin de les informer sur les produits d’assurances, qui visent la protection de leurs biens et de leurs personnes dans l’exercice de leurs métiers.
De son coté, le directeur général de la CNMA, Chérif Benhabiliès, a précisé que 16% seulement des agriculteurs sont assurés, même si ce taux est nettement mieux comparativement aux 4% enregistré en 2010.
Benhabilès explique ce taux « très faible » par le manque de culture d’assurance dans la société algérienne, appelant les compagnies à mieux communiquer et offrir des produits « innovants » notamment en incluant tout type de catastrophe naturelle.
Selon lui, les assurances agricoles ont besoin de l’intervention de l’Etat, en encouragent en amont ce segment financier au lieu de dépenser des sommes colossales après chaque catastrophe pour aider les agriculteurs.
« On doit sortir de la logique des subventions et adopter une logique économique viable qui permettra aux agriculteurs d’investir davantage et d’étendre leurs activités. L’assurance agricole notamment face aux risques climatiques va constituer un instrument très important pour sécuriser l’investissement agricole et le revenu », a-t-il déclaré Le secrétaire général de l’Union nationale des paysans algériens (UNPA), Mohamed Alioui, a souligné, quant à lui, la nécessité d’adopter une nouvelle approche avec un rôle plus important de l’Etat dans le système des assurances agricoles pour protéger davantage les petits exploitants.
Par aialleurs, le président de l’Association des banques et des établissements financiers (ABEF), M. Boualem Djebbar, a indiqué que les services de la finance islamique qui devraient être lancées au niveau des banques publiques à partir de la fin 2017, comprendront des produits financiers dédiés aux agriculteurs.
Selon les chiffres avancées par M. Djebbar, les agricultures bénéficient annuellement de 15 à 20 mds da de crédit saisonnier et de 40 mds da de crédits destinés à l’investissement.