Edito L’héritage de la filière lait est un défi

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L'héritage de la filière lait est un défi
L'héritage de la filière lait est un défi

Par Yacine Merzougui
eBourse-L’Algérie, riche de son patrimoine agricole, a longtemps considéré la filière lait comme un pilier
essentiel de son développement rural et de sa sécurité alimentaire.

Malgré les efforts déployés pour moderniser ce secteur, la réalité actuelle révèle un héritage empreint de complexités et de
mensonges qui rendent le rétablissement de la situation particulièrement ardu.
Depuis plusieurs décennies, la filière lait algérienne a été confrontée à une dépendance croissante
aux importations, représentant aujourd’hui près de 63 % de la consommation totale. Cette
situation n’est pas simplement le résultat d’un manque de volonté politique, mais découle d’une
multitude de facteurs structurels et historiques. L’argent octroyé aux éleveurs a été, pendant des
années, détourné au profit d’une « Issaba » parfaitement organisée.
L’élevage laitier, souvent caractérisé par une fragmentation des exploitations, fait face à des
rendements médiocres, avec une moyenne de 11 litres par vache et par jour. Il est alarmant de
constater que près de la moitié des éleveurs possèdent moins de cinq vaches, ce qui limite leur
capacité à produire à grande échelle.
Les efforts de l’État pour soutenir la production laitière, notamment à travers des primes et des
subventions, n’ont pas encore permis d’atteindre l’autosuffisance. Malgré les investissements
massifs, dépassant les 20 milliards de dollars d’importations depuis 2009, les résultats sont restés
mitigés. Le soutien financier, bien qu’indispensable, a souvent été mal orienté et surtout très mal
réparti pour transformer structurellement la filière.
Les prix administrés, figés depuis 2009, ne reflètent plus les réalités économiques du secteur,
rendant la rentabilité des exploitations de plus en plus précaire.

Pourtant, à la lecture du rapport de la Cour des Comptes, on se rend compte que des sommes
colossales ont été dépensées pour rétablir la filière.
Il a fallu donc prendre le taureau par les cornes et procéder à un recensement rigoureux de tout le
cheptel. Une opération qui a permis de constater quelque six millions de vaches imaginaires,
dont les propriétaires (ceux-là sont réels) bénéficiaient d’aides énormes de l’Etat.
La route vers le rétablissement de cette situation est semée d’embûches, mais avec une volonté
politique affirmée et une vision claire, l’Algérie a les moyens de transformer cette filière en un
véritable levier de développement économique et social. C’est un enjeu important pour l’avenir
alimentaire du pays et le bien-être de ses citoyens.
Y.M