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mardi, mai 13, 2025

Adhésion de l’Algérie aux BRICS

Les leçons de l’expérience de l’OMC et de l’UE

Par Yacine Merzougui

L’adhésion de l’Algérie au groupe BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) serait une étape stratégique majeure pour le pays, tant sur le plan économique que politique. Cette éventualité suscite des débats sur les avantages potentiels et les inconvénients éventuels de l’intégration algérienne à ce groupe d’économies émergentes. Au Sommet de Johannesburg (Afrique du Sud), l’Algérie devra présenter des arguments solides pour convaincre les Présidents des cinq Etats des nombreuses opportunités qui s’offrent suite à cette demande d’adhésion. Examinons de plus près les aspects positifs et négatifs d’une telle adhésion.

Avantages de l’adhésion aux BRICS

Accès à des marchés émergents : l’adhésion aux BRICS pourrait ouvrir de nouvelles opportunités commerciales pour l’Algérie sur des marchés en croissance, en particulier en Chine et en Inde, ce qui pourrait stimuler ses exportations et renforcer sa position économique.

Coopération économique : le groupe BRICS a développé des mécanismes de coopération économique, financière et commerciale. L’Algérie pourrait bénéficier de projets d’investissement et de partenariats pour divers secteurs, tels que l’industrie, l’énergie et les infrastructures. Ces mécanismes de coopérations pourraient, en revanche, servir de modèle à l’Algérie pour vaincre l’hégémonie de son administration qui a toujours été une entrave à l’expansion et l’essor de son économie.

Renforcement de la diplomatie : l’adhésion aux BRICS pourrait renforcer la position diplomatique de l’Algérie sur la scène internationale, en lui offrant une plateforme pour s’engager dans des discussions politiques et économiques de haut niveau. Pays influent sur la scène arabe et sur le continent africain et membre du Conseil de sécurité de l’ONU, l’Algérie pourrait avancer cette «carte» pour apporter une valeur ajoutée au groupe des BRICS.

Inconvénients potentiels

Divergences économiques : les économies des BRICS varient en taille, développement et politique. L’Algérie pourrait se retrouver confrontée à des défis liés aux divergences économiques et à la compétition avec des économies plus puissantes. L’Algérie devra en conséquence adapter son modèle économique pour équilibrer ses relations avec les différents membres des BRICS.

Contraintes politiques : certains observateurs pensent que l’adhésion aux BRICS pourrait exiger des concessions politiques ou économiques, ce qui pourrait limiter la souveraineté de l’Algérie dans certaines décisions nationales. Or, ce groupe BRICS, dès le début de sa constitution, a su réconforter ses adhérents en insistant sur la coopération dans le développement, sans s’immiscer dans les affaires internes des nations.

Dépendance envers certaines économies : s’engager étroitement avec les BRICS pourrait potentiellement exposer l’Algérie à des risques si ces économies connaissent des fluctuations économiques majeures. Cette crainte, exprimée par les plus pessimistes, est loin d’être exposée. Car, depuis presque trois décennies, ces pays des BRICS ont été les plus performants parmi les nations dites émergentes. Ils représentent quelque 40% du PIB mondial et s’adosser à ces économies ne peut que dispenser un avenir radieux pour l’Algérie.

Complexité de l’intégration : l’intégration aux BRICS nécessiterait des ajustements majeurs dans les politiques économiques et les mécanismes de coopération. Cela pourrait être complexe et exiger des réformes internes. A ce titre, l’Algérie a anticipé son adhésion à ce groupe par des réformes importantes dans son arsenal juridique. On évoque à ce sujet l’amendement du code de l’investissement, la loi sur le foncier industriel et surtout la loi sur la monnaie et le crédit.

L’expérience des négociations avec l’OMC et l’UE

Les avis pessimistes quant à l’adhésion de l’Algérie aux BRICS font référence surtout à l’amère expérience de l’Algérie avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Ils font également référence, quand ils évoquent les points négatifs, à l’accord d’association conclu avec l’Union européenne.

L’Algérie, en tant que pays en développement, avait entrepris des négociations importantes avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans le but d’intégrer davantage l’économie nationale dans le système commercial mondial. Ces négociations étaient le reflet des efforts déployés par l’Algérie pour améliorer son positionnement économique et renforcer ses relations commerciales internationales. Examinons de plus près les enjeux, les défis et les opportunités associés à ces négociations.

Les enjeux des négociations

Libéralisation des échanges : l’adhésion de l’Algérie à l’OMC implique généralement l’engagement à réduire les barrières tarifaires et non tarifaires, favorisant ainsi la libéralisation des échanges et facilitant l’accès aux marchés mondiaux.

Attractivité pour les investisseurs étrangers : l’engagement envers les règles et les normes de l’OMC était à même d’accroître l’attractivité de l’Algérie pour les investisseurs étrangers, en garantissant un cadre commercial transparent et prévisible.

Participation aux négociations commerciales multilatérales : l’adhésion à l’OMC devait permettre à l’Algérie de participer aux négociations commerciales multilatérales, influençant ainsi la formulation des règles commerciales mondiales.

Les arguments des opposants à l’OMC

Réformes économiques internes : les négociations avec l’OMC devaient exiger des réformes économiques internes profondes pour se conformer aux règles de l’organisation. Ce point précis était au centre de la discorde avec l’OMC. Sa mise en œuvre pouvait susciter certaines résistances politiques.

Protection des industries locales : les opposants de l’adhésion à l’OMC pensaient que l’ouverture aux marchés mondiaux pouvait exposer les industries locales à une concurrence accrue. Cette menace pouvait fortement impacter certains secteurs sensibles, autant dans le secteur public que privé.

Chronologie des négociations avec l’OMC

1987 – Demande d’adhésion : l’Algérie soumet une demande d’adhésion à l’OMC, signalant son intention de rejoindre le système commercial mondial.

2002 – Début des négociations : les négociations formelles d’adhésion à l’OMC commencent, marquant une étape importante dans le processus d’intégration économique de l’Algérie.

2005 – Soumission de l’offre initiale : l’Algérie soumet son offre initiale pour l’adhésion à l’OMC, décrivant ses politiques commerciales et ses engagements préliminaires.

2010 – Examen des politiques commerciales : l’Algérie se soumet à un examen approfondi de ses politiques commerciales et économiques par les membres de l’OMC.

2017 – Poursuite des négociations : les négociations se poursuivent alors que l’Algérie s’efforce de finaliser ses engagements et de s’aligner sur les normes de l’OMC.

Ces négociations sont rentrées plus tard dans une léthargie en raison notamment des vides politiques qui se sont succédé. Après la présidentielle du 12/12/2019, la priorité a été accordée à la mise à niveau des lois régissant l’économie nationale.

L’Accord d’association Algérie-UE : un Aperçu historique

L’Accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne (UE) représente une étape significative dans les relations bilatérales et économiques entre les deux entités. Cette association, conçue pour promouvoir la coopération politique, économique et sociale, a évolué au fil des ans en réponse aux changements politiques et économiques régionaux et mondiaux. Examinons l’historique de cet Accord et son évolution au cours des années.

1972 – Lien privilégié : les relations entre l’Algérie et la Communauté économique européenne (ancêtre de l’UE) ont commencé à se renforcer, avec la signature d’un accord commercial préférentiel en 1972.

Années 1990 – Prémices de l’Accord d’association : les discussions formelles pour un Accord d’association plus complet ont débuté dans les années 1990, avec l’objectif de renforcer les relations politiques et économiques.

2002 – Accord-cadre : l’accord d’association entre l’Algérie et l’UE a été signé en avril 2002. Il a établi un cadre global pour la coopération et jeté les bases pour des négociations futures.

2005 – Accord d’association : l’accord d’association a été signé en septembre 2005, en établissant un cadre juridique pour la coopération politique, économique et sociale entre les deux parties.

Contenu de l’Accord d’association

L’Accord d’association entre l’Algérie et l’UE englobe une gamme de domaines de coopération, notamment :

Commerce et économie : l’Accord vise à faciliter le commerce entre les deux parties, à encourager les investissements et à promouvoir le développement économique.

Dialogue politique : l’accent est mis sur le dialogue politique régulier, couvrant des sujets tels que la paix, la sécurité et les droits de l’homme.

Coopération sociale et culturelle : l’accord encourage la coopération dans les domaines de l’éducation, de la culture, de la science et de la technologie.

Réformes internes : l’Algérie s’engage à mettre en œuvre des réformes internes pour promouvoir la démocratie, les droits de l’homme et l’Etat de droit.

Evolution post-signature

2010 – Révision et modernisation : les deux parties ont entrepris des discussions pour moderniser et réviser l’accord afin de le rendre plus pertinent et efficace à la lumière des changements politiques et économiques mondiaux.

2020 – Nouveau souffle : les discussions sur la modernisation de l’accord se poursuivent, avec un accent sur la mise en place d’un partenariat économique solide et équilibré.

Conclusions

Si les accords avec l’OMC et l’Union européenne ont échoué, pour notamment des considérations de souveraineté, de préservation des valeurs nationales et de notre économie, l’adhésion aux BRICS est plus fluide dans la mesure où ce groupe a basé son statut principalement sur l’échange économique. Les contraintes politiques et les immixtions dans les affaires internes des pays sont quasi inexistantes dans la doctrine des BRICS.

En somme, l’Algérie a besoin d’expansion de ses échanges dans un espace aussi puissant que le groupe BRICS. En revanche, ce groupe a besoin de l’Algérie et de ses arguments (géopolitique, richesses minières, avantage énergétique et surtout sa stabilité interne). L’Algérie sera indiscutablement admise au sein du groupe. Sauf qu’une phase transitoire s’impose pour la mise à niveau des lois et règlements en Algérie.

Y. M.

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