Le 17 octobre 1961 est une date marquante dans l’histoire de la Révolution de
Novembre et des relations franco-algériennes. Ce jour-là, des milliers
d’Algériens se sont rassemblés à Paris pour manifester en faveur de
l’indépendance de leur pays. Cette mobilisation, qui visait à dénoncer la
répression dont les Algériens faisaient l’objet en France, a été violemment
réprimée par la police parisienne, sous le commandement de Maurice Papon,
préfet de police de la capitale française. Ce mouvement se distingue comme
l’une des rares révolutions de l’histoire à mener des actions directement sur le
territoire du colonisateur, marquant ainsi un tournant décisif dans la lutte pour
l’indépendance. La colonisation française en Algérie, qui a débuté en 1830, a
été marquée par des actes de violence et de répression inouïes. Les Algériens
luttaient contre le colonialisme français, cherchant à mettre fin à plus de 130
ans de domination. À cette époque, la France, sous la IVe République, était en
proie à des crises politiques, et la guerre en Algérie suscitait de vives divisions
au sein de la société française. À Paris, les Algériens constituaient une
communauté importante, souvent confrontée à des conditions de vie précaires
et à des discriminations. La manifestation du 17 octobre s’inscrivait dans une
série d’actions destinées à attirer l’attention sur les injustices vécues et la
violence subie par les Algériens, notamment ceux de l’Hexagone, notamment le
couvre-feu discriminatoire imposé aux membres de cette communauté. L’appel
à manifester a été lancé par le FLN, qui souhaitait revendiquer le droit à
l’autodétermination et dénoncer la répression systématique à laquelle ils
étaient soumis. Près de 30 000 personnes ont défilé pacifiquement dans les
rues de Paris, brandissant des banderoles et scandant des slogans pour
l’indépendance. Cependant, la réponse des autorités a été brutale. Maurice
Papon a ordonné une répression sévère, et les forces de répression ont attaqué
les manifestants, procédant à des arrestations massives, à des violences
physiques et à des rafles. Les témoignages font état de dizaines de personnes
tuées, certaines estimations allant même jusqu’à 200 morts. Les corps des
victimes ont été jetés dans la Seine, un acte qui témoigne de l’ampleur de la
répression et du mépris pour la vie humaine. Les événements du 17 octobre
1961 ont longtemps été tus, occultés par la mémoire collective française. La
France n’a pas reconnu officiellement cette répression pendant des décennies,
et il a fallu attendre 1998 pour que le président Jacques Chirac reconnaisse la
responsabilité de l’État français dans ces événements tragiques. Cette
reconnaissance a été un premier pas vers la réparation de la mémoire
historique, mais le chemin reste semé d’embûches du fait de l’entêtement du
pouvoir français à reconnaître sa totale responsabilité. En parallèle, le débat
sur la colonisation française demeure un sujet sensible en France. En 2005, le
Parlement français a voté une loi saluant les « bienfaits » de la colonisation, un
acte qui a provoqué une controverse et des protestations. Ce contraste avec les
déclarations récentes d’Emmanuel Macron, qui a reconnu l’ »inhumanité » de la
colonisation, souligne les tensions persistantes dans le débat sur le passé
colonial de la France. La reconnaissance des souffrances infligées aux peuples
colonisés et des injustices de cette période historique reste un enjeu crucial
pour la réconciliation des mémoires. Le 17 octobre 1961 représente donc un
moment clé dans la lutte pour l’indépendance de l’Algérie, symbolisant la
répression coloniale et le désir d’émancipation d’un peuple. Cette date est un
rappel poignant des sacrifices consentis par les Algériens et de l’importance de
se souvenir des luttes pour la liberté. En réfléchissant à cet événement, il est
crucial d’interroger notre mémoire collective et de reconnaître les injustices du
passé. Cela est essentiel non seulement pour honorer la mémoire des victimes,
mais aussi pour construire des relations plus apaisées et respectueuses entre la
France et l’Algérie, en favorisant un dialogue sincère sur les blessures du passé
et sur les défis de l’avenir.
M. Mouloudj