Les moutons à 50.000 dinars en Algérie

L'Algérie se tourne vers l'Europe et l'Uruguay pour une importation massive

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L’opération d’importation massive d’ovins destinés au marché algérien prend forme avec une consultation élargie auprès de fournisseurs internationaux. Pas moins de 28 opérateurs économiques ont été approchés dans trois pays européens – l’Espagne, le Portugal et la Roumanie pour approvisionner le marché national en prévision de la période de forte demande.
Cette diversification des sources d’approvisionnement témoigne de la volonté des autorités algériennes d’assurer une disponibilité suffisante de bétail sur le marché local. L’Espagne, avec sa longue tradition d’élevage ovin et sa proximité géographique avec l’Algérie, constitue naturellement un partenaire privilégié. Le Portugal, également riverain de la Méditerranée, offre des avantages logistiques similaires. Quant à la Roumanie, ses vastes pâturages et son cheptel important en font un fournisseur potentiel de premier plan pour le marché algérien.
Au-delà du continent européen, l’Uruguay se présente comme une alternative prometteuse. Ce pays d’Amérique du Sud, réputé pour la qualité de son élevage bovin et ovin, dispose d’un potentiel considérable pour répondre aux besoins du marché algérien. Toutefois, des obstacles logistiques considérables se dressent face à cette option. La distance maritime entre l’Uruguay et l’Algérie, qui nécessite une traversée de l’océan Atlantique, soulève des inquiétudes quant à la disponibilité du bétail dans les délais impartis.
Le transport maritime constitue un maillon essentiel de cette chaîne d’approvisionnement. Les expéditions seront organisées par vagues successives, avec des cargaisons de 70 000 têtes par navire en provenance d’Europe. Pour les éventuelles importations depuis l’Uruguay, des bateaux de plus grande capacité pourraient être affrétés, permettant d’acheminer jusqu’à 140 000 têtes en
une seule expédition. Cette différence s’explique notamment par la nécessité d’optimiser les coûts logistiques sur les trajets transatlantiques plus longs.

Les prix plafonnés à l’achat
Sur le plan financier, la fourchette de prix proposée par les fournisseurs internationaux oscille entre 5 et 6 dollars américains par kilogramme d’ovin vif. Face à ces tarifs, le groupement des entreprises algériennes chargé de l’opération a fixé un plafond à 5,10 dollars par kilogramme.
Cette décision stratégique vise à maintenir les prix à un niveau raisonnable pour le consommateur final tout en garantissant la viabilité économique de l’opération.
Après intégration des différentes taxes, frais de transport et charges diverses, un mouton de 45 à 50 kilogrammes pourra être commercialisé sur le marché algérien à partir de 50 000 dinars. Ce prix, nettement inférieur aux tarifs pratiqués lors des précédentes fêtes de l’Aïd El Adha, devrait contribuer à stabiliser le marché et à rendre le sacrifice rituel plus accessible à un plus grand nombre de familles algériennes.

Cette opération d’importation s’inscrit dans un contexte de tension persistante sur le marché algérien des viandes rouges. La hausse continue des prix de la viande ovine locale a incité les autorités à recourir à l’importation massive pour réguler le marché. L’année précédente, les prix des moutons destinés au sacrifice de l’Aïd avaient atteint des sommets, dépassant parfois les 100 000 dinars pour un ovin de bonne taille, suscitant le mécontentement de nombreux consommateurs.
Le choix des pays fournisseurs n’est pas anodin. L’Espagne, qui partage avec l’Algérie une proximité géographique et des relations commerciales de longue date, dispose d’un cheptel ovin important, principalement composé des races Mérinos et Manchega, réputées pour leur adaptation aux climats méditerranéens. Le Portugal, avec ses races Bordaleira et Serra da Estrela, présente également un potentiel intéressant. La Roumanie, quant à elle, est connue pour ses races Tsigai et Turcana, qui pourraient s’avérer adaptées aux besoins du marché algérien.
L’Uruguay, bien que géographiquement éloigné, possède un avantage concurrentiel avec ses races Corriedale et Mérinos, élevées dans des conditions extensives sur de vastes pâturages. Ces ovins, réputés pour leur robustesse et la qualité de leur viande, correspondent aux critères recherchés pour le marché algérien. Cependant, la traversée de l’Atlantique représente un défi logistique considérable, tant en termes de durée que de conditions de transport des animaux vivants.
Les acteurs de la filière ovine locale observent avec attention cette opération d’importation massive. Certains éleveurs algériens expriment des inquiétudes quant à l’impact de ces importations sur les prix du marché local et sur la viabilité à long terme de leurs exploitations. Ils plaident pour des mesures d’accompagnement qui permettraient de renforcer la production nationale et de réduire progressivement la dépendance aux importations.
Du côté des consommateurs, l’annonce de cette opération d’importation et des prix annoncés est accueillie favorablement. Pour de nombreuses familles algériennes, le sacrifice du mouton lors de l’Aïd El Adha représente une dépense importante, parfois difficile à assumer. La perspective d’ovins disponibles à 50 000 dinars constitue donc une nouvelle encourageante.
Les autorités vétérinaires algériennes se préparent activement à cette opération d’envergure. Des protocoles sanitaires stricts seront mis en place pour garantir que les animaux importés répondent aux normes sanitaires en vigueur en Algérie. Des équipes de contrôle seront déployées dans les pays fournisseurs pour superviser les opérations de sélection et d’embarquement des ovins.
Cette initiative d’importation massive s’inscrit dans une stratégie plus large de régulation du marché des produits de première nécessité en Algérie. Les autorités cherchent à concilier les intérêts des consommateurs, qui aspirent à des prix abordables, et ceux des producteurs locaux, qui doivent pouvoir maintenir la viabilité économique de leurs exploitations.
Y.M